Nourrir une population qui va doubler dans les 25 années qui viennent en Afrique, et en même temps permettre à l'agriculture africaine de prospérer... Et si la solution passait par la signature de contrats entre les paysans et l'industrie ? Les uns peinent souvent à trouver un débouché à leur production, en Afrique, ce sont les petits agriculteurs. Les autres, transformateurs, veulent garantir leur approvisionnement, pour satisfaire une demande alimentaire de plus en plus forte en Afrique. Pourtant, entre ces deux maillons de la chaîne agro-alimentaire, les contrats sont rares. Ou alors ils visent les cultures d'exportation, comme le cacao, très peu les marchés intérieurs africains. Gagner en qualité Des pionniers de cette contractualisation ont pourtant vaincu les obstacles. Ils témoignaient au colloque de la fondation FARM pour l'agriculture et la ruralité dans le monde, ce jeudi. Halatou Dem, à la tête de Danaya Céréales, une petite entreprise de transformation céréalière au Mali, évoque son premier contrat avec une coopérative de Ségou pour se fournir en fonio, en mil et en maïs. « Il s'est assez mal passé », se rappelle-t-elle, « la qualité était mauvaise », mais la PME malienne a formé les agriculteurs, notamment à « mettre en sacs sans déchets »... Pas de prix dans le contrat, les paysans sont payés au prix du marché, avec une prime de qualité. Ils ont au passage gagné un accès au Programme alimentaire mondial, qui achètera aussi l'an prochain la farine de mil enrichie en nutriments de l'entreprise malienne. Assurance, appui technique et financement A une autre échelle, le géant sénégalais du poulet Sedima propose des contrats aux éleveurs depuis deux ans. Jusque-là, le groupe ne leur fournissait que des intrants (poussins et aliments), mais depuis Sedima s'est équipé d'un abattoir. L'entreprise sénégalaise a été « obligée de contractualiser avec les éleveurs pour le faire tourner », explique Birane Ndiaye, son porte-parole. Eviter que les poulets ne partent entre les mains des petits marchands ambulants, ça se paie : les contrats incluent une assurance, un appui technique vétérinaire, et l'accès au financement pour les soins de santé ou l'école des enfants, sans justificatif. « Sedima perd de l'argent depuis le début, mais c'est un investissement et le groupe y croit, confie Birane Ndiaye. Avant nous, la laiterie du Berger a perdu de l'argent pendant dix ans ! ». Soutien public La structuration des filières agricoles est donc en marche en Afrique, mais elle a besoin du soutien des États et des bailleurs. La fermeture des frontières sénégalaises, pour des raisons sanitaires, a permis à l'industrie locale du poulet de se développer à l'abri des importations européennes ou brésiliennes. Mais ce choix n'est pas toujours possible et il est coûteux puisqu'il prive de taxes les caisses de l'État.
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